Les rumeurs en tant que phénoméne d'influence sociale
La rumeur est une influence sociale car elle peut prendre son origine dans un groupe ou dans une institution pour agir sur les comportements, les croyances, et les opinions d’un individu. Mais elle peut aussi partir d’un fait et avoir une influence sur toute une société. Il s’agit souvent d’une influence inconsciente car on ne se rend pas compte de la réalité de la rumeur et encore moins de l’impact de son message sur notre vie quotidienne.
Selon nous, la rumeur s’apparente à la légende urbaine. Il s’agit d’un récit ou d’un message qui n’est pas vérifié et qui transmet une information sortant de l’ordinaire. Elle se diffuse par le « bouche à oreille », mais aussi par les médias et disparaît comme elle est apparue.
Evolution du sens du mot
L’origine du mot rumeur : "rumor" signifie en latin "bruit qui court, rumeur publique". Àl'origine, la rumeur désigne donc le bruit confus de voix qui émane d’une foule.
Au XIIIe siècle, le mot rumeur a encore une autre connotation, celle de bruit, tapage, querelle, révolte. On trouve en effet les premières traces écrites du mot dans un document du parlement de Paris datant de 1274. Il désigne alors le "haro", le cri qu’était obligé de pousser tout citoyen s’il assistait à un crime de manière à attirer l’attention de la maréchaussée.
Au XVIe siècle le sens latin revient et c'est les nouvelles qui se répandent dans le public et dans l'opinion. La rumeur implique donc la notion de nouvelle d'information.
C'est en remontant vers le XVIIIe siècle et vers la notion du bruit qu'apparaît les notions de vrai bruit et de faux bruit avec la notion un peu plus moderne de propagation et de démentit ou au contraire d'authentification de la rumeur.
Le mot continue à évoluer jusqu’à la deuxième guerre mondiale où il acquiert la signification que nous lui connaissons.
2 critères pour repérer une rumeur à l’état pur
- Aucun fait ne peut servir de point de départ ou d’appui à la rumeur,
- L’information circule toujours de bouche à oreille en dehors de la presse, de l’affiche, du
tract ou même du graffiti.
Ainsi, pour Morin, contrairement au sociologue précédent, la rumeur ne part pas d’un événement mais se caractérise justement pas l’absence d’éléments pouvant servir de base à son apparition. De plus, dans cette définition, la rumeur ne se transmet que par le bouche à oreille, ce qui paraît impossible aujourd’hui avec l’importance des médias.
D’après Kapferer, cette définition de la rumeur la restreint aux seules histoires sans faits justificatifs et a produit un effet pervers : la rumeur a acquis l’image d’une maladie mentale du corps social. Pour preuve la terminologie médicale utilisée par Morin dans son ouvrage : germe, pathologie, foyer infectieux, phase d’incubation, de métastase. La rumeur est ainsi assimilée à une maladie à un « cancer mental ». Kapferer parle de psychiatrisation de la rumeur.
La rumeur devient alors dans cette approche une sorte de perturbation de la communication sociale alors qu’elle est avant tout un mode d’expression de la pensée sociale.
8 caractéristiques
1) L’anonymat : car le récit est sans arrêt réanimé par la pensé collective.
2) L’histoire, qui paraît unique, présente en réalité un ensemble de variantes attestées dans le temps et l’espace.
3) La brièveté : le récit est en effet succinct de type narratif qui possède ses propres lois et
auquel se rattachent des sous-genres très variés. Cela va de l’anecdote historique à la fable en passant par le conte, le fait divers ou encore l’histoire drôle...
4) La notion de surprise : le contenu du récit est toujours étonnant et inhabituel. Comme dans les histoires drôles, on observe la présence d’une chute qui produit son effet sur l’auditoire.
5) La véracité de récit. En effet l’histoire est énoncée comme authentique alors que sa légitimité est douteuse. Tout d’abord il n’y a généralement pas de preuves de ce qui est avancé et fréquemment le dénouement est inapproprié à la réalité. Si on prend l’exemple de l’élève de terminal qui a pour sujet en philosophie : « qu’est ce que le risque ? », rend feuille blanche et obtient une très bonne note ; tous les professeurs de philosophie expliquent que cette matière demande de la réflexion et non un passage à l’acte, ainsi cet élève n’aurait sûrement pas été bien noté.
6) Il est important de comprendre pourquoi une légende circule. Chaque milieu social génère ses propres anecdotes dans lesquelles ses membres se sentent impliqués. On est toujours plus intéressé par les histoires qui parlent de nous. Par exemple dans le lycée l’anecdote de sujet de philosophie va circuler facilement car les élèves se sentent concernés : ça peut leur arriver !
7) Plus l’histoire est récente et plus elle semble crédible. C’est pourquoi les légendes sont continuellement réactualisées.
8) Pour finir, l’histoire doit être « une histoire exemplaire » selon l’expression de Véronique Campion-Vincent. Cela signifie que le récit doit émettre un message implicite : une morale cachée à laquelle tout le monde adhère.
Parce qu'elles ont un sens.
Les légendes urbaines expriment sous une forme narrative et symbolique les angoisses et les désirs des individus en société, comme nous l’avons déjà souligné pour la rumeur.
Les rumeurs ou les légendes urbaines sont donc des histoires significatives et utiles à interpréter : elles ont un sens.
Source :
http://pascalfroissart.online.fr/1-extern/mich-04.pdf