Non-dualité - par la moniale Ayya Khema
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Environ 150 ans après la mort de Siddhartha Gautama. Dix-huit écoles bouddhistes sont apparues progressivement, dues en premier lieu à des différences de vinaya, une division du Sangha originel, généralement considérées comme étant celles des Sthaviravādins et des Mahāsāṃghikas. Et plus tard dues à la séparation géographique des divers groupes.
Environ 150 ans après la mort de Siddhartha Gautama. Dix-huit écoles bouddhistes sont apparues progressivement, dues en premier lieu à des différences de vinaya, une division du Sangha originel, généralement considérées comme étant celles des Sthaviravādins et des Mahāsāṃghikas. Et plus tard dues à la séparation géographique des divers groupes.
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Non-dualité - par la moniale Ayya Khema
Ecrit le 11 sept.20, 10:19Non-dualité
Ayya Khema
Extrait du livre sur Ayya Khema à paraître chez Sully en octobre 2015
Traduit par Jeanne Schut
La vérité occupe une place très importante dans l’enseignement du Bouddha. Les Quatre Nobles Vérités sont le moyeu de la roue du Dhamma. La vérité (sacca) est l’une des dix perfections que l’on doit cultiver pour se purifier. La vérité peut prendre des aspects différents. Si nous voulons mettre fin à la souffrance, nous devons trouver la vérité à son niveau le plus profond.
Les préceptes de moralité qui incluent « ne pas mentir » sont un entraînement fondamental sans lequel il est impossible de mener une vie spirituelle. Mais, pour toucher le fond de la vérité, nous devons aller tout au fond de nous-mêmes et ce n’est pas chose facile, d’autant qu’il s’y ajoute le problème du rejet de soi. Or, si nous voulons apprendre à nous aimer nous-mêmes, cela signifie nécessairement que l’aversion est présente… et nous nous retrouvons piégés dans le monde de la dualité.
Tant que nous flottons à la dérive dans le monde de la dualité, nous ne pouvons pas atteindre le fond de la vérité car nous sommes en suspens dans un mouvement de vagues qui vont et viennent. Il y a un passage intéressant dans le Sutta Nipata qui nous recommande d’éviter de nous rapprocher trop des autres pour ne pas être piégés par l’attachement. Ainsi, nous sommes capables de ne ressentir ni amour ni haine ; seule règne l’équanimité : l’esprit demeure stable et serein en toutes circonstances. Nous ne sommes plus ballottés entre le bon et le mauvais, l’amour et la haine, l’ami et l’ennemi. Grâce à l’équanimité, nous pouvons abandonner les attachements et aller tout au fond, là où la vérité peut être trouvée.
Si nous voulons trouver la vérité fondamentale de toute forme d’existence, nous devons pratiquer le lâcher-prise, apprendre à laisser aller tous nos attachements, les plus légers comme les plus forts… dont nous ne sommes souvent même pas conscients.
Pour en revenir à l’image de la vérité qui se trouve au fond de nous, il est facile de voir que, si nous sommes attachés à quoi que ce soit, nous ne pouvons pas y parvenir. Si nous sommes attachés aux objets, aux gens, aux idées et aux opinions que nous considérons comme nôtres et que nous croyons être justes et utiles, ces attachements nous empêcheront d’entrer en contact avec la vérité absolue. Nos réactions, nos «j’aime» et «je n’aime pas», sont des entraves qui nous retiennent en suspens. Même s’il est plus agréable d’aimer que de détester quelque chose ou quelqu’un, il s’agit toujours d’attachement.
En méditation, cette difficulté est très proche de la distraction. De même que nous sommes attachés à la nourriture qui alimente le corps, nous sommes attachés à ce qui alimente l’esprit, de sorte que les pensées vont ici et là ramasser des miettes. Ce faisant, nous sommes encore en suspens, allant sans cesse de l’observation de la respiration à des pensées, baignant dans le monde de la dualité. Quand notre esprit est tellement agité, il lui est impossible d’investiguer en profondeur.
La profondeur de la compréhension permet la libération de la souffrance. Quand on va toujours plus profond en soi, on découvre qu’il n’y a aucun noyau central, aucun véritable « moi », et il devient plus facile de lâcher les attachements. Qu’il y ait en nous quelque chose de pur, de désirable, d’admirable ou quelque chose d’impur et de désagréable ne fait aucune différence. Tous les états mentaux auxquels nous sommes attachés et identifiés nous maintiennent dans la dualité, là où nous sommes suspendus au-dessus du sol, dans une position très in-sécurisante. Ils nous empêchent de trouver la voie qui mène à la cessation de la souffrance. A un certain moment tout peut sembler aller à merveille et nous aimons tout le monde mais, cinq minutes plus tard, nous pouvons réagir avec colère et aversion.
Peut-être sommes-nous d’accord avec les paroles du Bouddha ou les considérons-nous comme une explication plausible mais, sans la certitude qu’apporte l’expérience personnelle vécue, cela ne nous aidera pas beaucoup. Pour avoir une connaissance directe, il faut devenir comme un poids qui ne doit être attaché à rien pour pouvoir couler jusqu’au fond de tous les obstacles et voir la vérité briller là. L’outil dont nous avons besoin pour cela est un esprit fort, un esprit qui fait le poids. Tant que l’esprit s’intéresse à des choses dérisoires, il n’a pas le poids nécessaire pour atteindre la profondeur de la compréhension.
L’esprit de la plupart d’entre nous n’appartient pas à la catégorie des poids lourds ; il se rapproche plutôt des poids coqs. Le coup d’un poids-lourd a vraiment de l’effet ; celui d’un poids-plume est sans grandes conséquences. L’esprit qui ne pèse pas lourd est attaché ici et là à des gens et à leurs opinions, à ses propres opinions, à toute la dualité du pur et de l’impur, du vrai et du faux.
Pourquoi prenons-nous les choses aussi personnellement alors qu’en réalité elles sont universelles ? Il semble que ce soit la différence la plus importante entre vivre heureux, l’esprit en contact avec la vérité la plus profonde, et vivre en désaccord avec soi et les autres. Le désir et l’aversion n’ont rien de personnel ; personne ne peut prétendre en être seul détenteur ; ils appartiennent à l’humanité. Nous pouvons apprendre à lâcher cette idée personnalisée que nous avons de nos états mentaux et cela nous libérerait d’un sérieux obstacle. L’avidité, l’aversion et les poisons de l’esprit existent de la même manière qu’existent aussi la non-avidité et la non-aversion. Pouvons-nous être détenteurs de tout ? Ou bien sont-ils nôtres à l’occasion, l’un succédant à l’autre pendant quelques minutes ? Pourquoi les posséder ? Ils existent, tout simplement et, quand on voit cela clairement, il devient possible de se laisser couler dans la profondeur de la vision du Bouddha.
La vérité la plus profonde que le Bouddha a enseignée, est qu’il n’y a pas vraiment d’individu, de « personne ». Pour que nous puissions accepter cette vérité, il faut que nous en fassions l’expérience au niveau du ressenti. Tant que l’on n’a pas lâché le sentiment d’être et de posséder ce corps et cet esprit, on ne peut pas accepter l’idée de ne pas être une personne. C’est un processus graduel. En méditation, on apprend à lâcher les idées et les histoires qui encombrent l’esprit pour s’intéresser à l’objet de méditation. Si on ne les lâche pas, on ne peut pas pénétrer dans la méditation. Là encore, l’esprit doit nécessairement être un poids-lourd.
Nous pouvons comparer l’esprit ordinaire à un objet qui flotterait au gré des vagues des pensées et des ressentis. C’est ce qui lui arrive en méditation. Pour qu’il devienne un poids-lourd, nous devons nous préparer à la concentration en observant tous les états d’esprit qui nous assaillent dans la journée et en apprenant à les lâcher. La légèreté et le bien-être qui en résultent sont le fruit du détachement.
Si nous ne pratiquons pas ainsi tout au long de la journée, notre méditation en pâtit parce que nous n’arrivons pas à notre coussin de méditation dans un état d’esprit approprié. Par contre, si nous avons lâché prise toute la journée, l’esprit est prêt et peut maintenant aussi lâcher prise en méditation. Il fait ainsi l’expérience de son bonheur et de sa pureté intrinsèques.
Parfois les gens croient que l’enseignement du Bouddha est une sorte de thérapie, et il est vrai qu’il soigne, mais ce n’est pas son but ultime, seulement l’un de ses effets secondaires. L’enseignement du Bouddha nous conduit jusqu’à l’extinction de la souffrance. La souffrance prend fin définitivement, une fois pour toutes, et pas seulement de temps en temps, quand les choses vont mieux.
Quand on a eu une expérience de lâcher-prise, ne serait-ce qu’une fois, on sait, sans l’ombre d’un doute, que cela signifie se libérer d’un lourd fardeau. Porter avec soi avidité et aversion est une lourde charge. Quand on l’abandonne, elle nous libère de la dualité du jugement. Il est agréable de ne pas penser ; ce sont les formations mentales qui créent tous nos soucis.
Si nous réussissons, au moins une ou deux fois par jour, à lâcher nos réactions, nous faisons un grand pas en avant et pouvons, par la suite, en faire d’autres de plus en plus facilement. Nous réalisons qu’un ressenti qui est apparu peut être arrêté, que nous ne sommes pas obligés de le porter avec nous toute la journée. Le soulagement que l’on en éprouve est la preuve qu’une grande découverte intérieure a été faite et que la simplicité de la non-dualité nous montre la voie de la vérité.
"Sachant que la vie est courte, pourquoi vous quereller ?" Le Bouddha.
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